Notre troisième épisode

Pour le troisième épisode de La haine de la poésie, nous recevons au bout du fil François Dumont, ainsi que Vincent Lambert en studio. L’imaginaire de la poésie de François Dumont tourne autour de l’expression d’un manque, ainsi que de l’ouverture vers le lectorat. En effet, un bon poème, pour lui, est un poème qui multiplie les ouvertures pour la personne qui lit, qui multiplie les occasions d’intervenir pour les lecteur.trice.s. Simon, Vincent et François discutent également du lien entre la poésie et le social, un lien important à souligner, notamment dans le cadre du 50e anniversaire de la crise d’octobre. François aborde aussi la question du pronom dans l’histoire de la littérature québécoise depuis les années 1960. Vincent Lambert nous lit par après un extrait inédit.


C’était bien agréable d’échanger avec Simon et Vincent, anciens étudiants qui me ramenaient à deux périodes différentes de mon expérience d’enseignement. On n’a pas souvent l’occasion de discuter de poésie à l’extérieur de l’université — et même à l’intérieur, à vrai dire, car même chez les spécialistes de littérature, la poésie reste un genre marginal. J’ai essayé de faire valoir la singularité de l’expérience de la lecture du poème comme une sorte de face-à-face intérieur et de souligner la dimension historique de la poésie comme ensemble de « perplexités que le temps a rendues vénérables », selon la formule de Borges. Il me semble que ces deux aspects, intérieur et historique, sont les plus négligés actuellement, mais j’espère qu’on aura compris que je ne voulais pas dévaloriser pour autant la poésie mise en sons ou en scène, qui est à mon avis un autre volet important de l’expérience poétique.
— François Dumont


Réunis autour d'une table et d'une lampe dans une salle noire entourée de rideaux noirs (un studio d'enregistrement) et dans cet endroit un peu clandestinement (dans le respect des mesures sanitaires) parler de poésie était (avant même de répondre aux questions de Simon) une définition de la poésie comme une voix qui essaie de nous rejoindre depuis le noyau vibrant d'un grand silence (et c'était chouette (c'était comme une chouette qui tourne les yeux vers nous dans les bois) de parler dans une parenthèse à l'intérieur d'une parenthèse) qui nous connaît mieux que nous-mêmes.
— Vincent Lambert












Nos invités

François Dumont

François Dumont, professeur de littérature, poète et essayiste

François Dumont est professeur au Département de littérature, théâtre et cinéma de l'Université Laval. Il est l’auteur de recueils de poèmes, dont Brisures (Le Noroît, 2005) et Battements (Le Noroît, 2017) et de plusieurs essais, dont Usages de la poésie (PUL, 1993), Le poème en recueil (Nota bene, 2010) et L’ombre du roman (Nota bene, 2017). Il a tenu des chroniques au quotidien Le Devoir et à la revue Voix et images et a réalisé plusieurs rééditions, dont la première édition intégrale du Journal de Saint-Denys Garneau (Nota bene, 2012). Il a aussi cosigné Histoire de la littérature québécoise avec Michel Biron et Élisabeth Nardout-Lafarge (Boréal, 2007) et réalisé des enregistrements de poèmes et de chansons avec l’Atelier volant (dont Contrepoints, Biennale des poètes en Val-de-Marne, 2010). Il travaille actuellement à l’édition des œuvres complètes de Jacques Brault et collabore à un groupe de recherche sur la littérature québécoise contemporaine.

© photo : Fangliang Xu


Vincent Lambert

Vincent Lambert, poète et essayiste

Vincent Lambert est né en 1980, à Saint-Narcisse-de-Beaurivage. En 2005, il s’est joint au comité de rédaction de la revue Contre-Jour où il a publié quelques essais et préparé des numéros sur la magie et la poésie d’Anne Hébert. Chroniqueur à la revue l’Inconvénient, il a publié les recueils Paysages récents (Le Lézard amoureux, 2005), La fin des temps par un témoin oculaire (l’Hexagone, 2013) et Mirabilia (Le Quartanier, 2019). Son essai L’Âge de l’irréalité. Solitude et empaysagement au Canada français (1860-1930) s’est mérité le prix Victor-Barbeau 2019. Il habite Saint-Philémon, un petit village des Appalaches, sur la rive sud de Québec.

© photo : Le Quartanier, Justine Latour